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Conception d'un modèle alternatif d'enquête interne

À la fin du confinement, un client nous exprime le besoin de "prendre la température" auprès de ses équipes car il ne peut plus parier sur les échanges informels, réunions et autres entretiens en face-à-face. Il veut pouvoir identifier les difficultés liées au télétravail mais aussi repérer d'éventuelles problématiques inédites.

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Je propose alors de parier sur une approche qualitative pour identifier les éléments saillants. Cette démarche s’appuie sur plusieurs convictions : - Ce qui est important vient spontanément à l’esprit - Parfois, il est plus facile d'énoncer un ressenti que de l’évaluer/quantifier - Toute préoccupation est légitime - La pondération peut être apportée par le collectif Pour ces raisons, le questionnaire classique qui définit les pain points a priori et avec le prisme de l’employeur me semble peu pertinent. Il met l’emphase sur des problèmes peut-être pas si importants et peut occulter des sujets qu’on n’aurait pas pensé à lister.

Méthodologie alternative proposée

💡
ÉTAPE 1 / Faire émerger les réflexions individuelles : chaque collaborateur produit une ou des réflexions en complétant des amorces de phrase
⚖️
ÉTAPE 2 / Faire confiance au collectif pour pondérer : chaque collaborateur reçoit les résultats et indique quelles réflexions doivent retenir l'attention des Dirigeants
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ETAPE 3 / Analyse sémantique et statistique
Stack technique : Typeform + Airtable

Réalisation d'un pilote

Contexte

Pour cette entreprise de 13 personnes, un format de trois questions initiales a été imaginé.

🙂
"Je suis confiant.e à l'idée..."
😕
"Ce serait dommage si..."
🙌
"Je serais partisan d'essayer..."

Bilan

✔️
100% de participation sur la première étape
✔️
31 réflexions produites
✔️
92% de participation sur l'étape d'évaluation

Une priorisation concrète sur les sujets de préoccupation ou confiance de l'équipe.

  • En analysant leurs occurrences dans les réflexions spontanées : un thème a été présent dans 50% des réflexions produites
  • En confirmant leur importance par le taux d'adhésion de l'équipe (certains thèmes ont été tagués par + de 75% des collaborateurs)

Une démonstration de la volonté de transparence des Dirigeants en donnant accès aux réflexions sans filtre.

Pour les collaborateurs, une incitation à partager de façon plus systématique et/ou informelle leurs préoccupations. En effet, on se sent plus légitime quand on a observé que nos collègues avaient eux aussi des sujets de questionnement et que la Direction les accueillait avec bienveillance.

détail

Réponse à Mathilde sur Recruiters Kitchen

Hello Mathilde, je confirme ce qui a été dit avant.Tu touches à un sujet de réflexion depuis pas mal d'années du coup je m'excuse pour le pavé

A titre de complément donc, ce qui me pose problème avec les labels (pour avoir échangé avec des clients utilisateurs de best place to work et avoir fait une table ronde avec son Président) :

  • c'est que, quand tu rejoins le classement ça peut créer une dépendance vis à vis du label. Si le logo sur ton site apporte (peut-être) un peu de + l'année d'obtention, tu es obligé de renouveler le partenariat (et donc engager de nouveaux frais) pour ne pas disparaitre l'année suivante. Parce que dans la tête des candidats si tu sors du classement ce n'est pas parce que tu as arrêté de payer mais parce que les conditions de travail se sont dégradées. Il faut donc avoir en tête que si tu veux faire un one shot l'effet sera vite obsolète et il faudra même peut-être mieux retirer le macaron pour pas faire louche les années suivantes) -> c'est un peu comme quand tu passes devant un restau qui a un stickers Guide du routard de 2012
  • l'autre point est plus largement applicable au recours à des instituts de sondage. Le principe de baromètre social a vocation a être proposé de façon récurrente mais du coup, pour mesurer l'évolution d'une année sur l'autre il faut garder exactement le même questionnaire pour établir des comparaisons. Là encore il y a donc un effet de dépendance créé vis à vis de l'organisme.
  • le 3e point, pour l'avoir bien connu chez Louis Vuitton où j'ai piloté le processus d'enquête interne en local sur un atelier de production puis en coordination pour tout l'industriel c'est que l'approche quanti ne peut pas exclure un temps qualitatif complémentaire pour expliciter les résultats. Et je ne parle pas de restitution mais bien de discussions. Sinon on peut vite aller dans le mur en regardant juste les stats. C'est donc un coût supplémentaire à prendre en compte.

Un ex très concret : je me souviens qu'en atelier une partie des équipes avait donné une évaluation très négative des conditions de travail et que tout le monde était choqué quand on avait vu les chiffres en codir (un atelier de prod chez LV ça ne ressemble pas à une usine d'agro alimentaire hein)... Mais quand on a organisé les groupes de discussion on a réalisé que ces réponses là visaient à pointer un problème de clim qui avait été déjà été réglé depuis le questionnaire. Si on n'était pas passé par cette étape de discussion pour recueillir la perception / l'interprétation des répondants on n'aurait peut-être monté des groupes de travail sur le sujet, lancé des plans d'action sans intérêt et, pire, on serait peut-être resté avec cette impression que certains maroquiniers étaient des "enfants gâtés".Cela m'amène à un dernier point beaucouuuuuup plus global sur la logique de sondage interne qui me travaille beaucoup depuis cette époque mais aussi  quand on a implémenté supermood au sein de l'étincelle RH.Je me questionne sur les biais créés par le simple fait de poser des questions auxquelles il faut répondre par oui/non ou sur la présentation de thématique qu'il faut scorer.

Si je reviens à mon exemple plus haut : la question sur les conditions de travail était rédigée à peu près comme ça "Pensez-vous que vos conditions de travail soient satisfaisantes ? (Lumière, espace, température...)"... Ha tiens et comme par hasard les gens se sont focalisés sur la clim

Il est extrêmement difficile de :

1/ recenser des sujets de préoccupation de façon exhaustive (et pourtant la plupart de ces questionnaires ont entre 50 et 100 items)

2/ c'est encore plus difficile de le faire de façon universelle, consistante dans le temps et qu'on n'est pas la personne directement concernée

3/ rédiger une question sans qu'elle oriente, même juste un peu, la réponse

4/ pour le répondant, de faire un travail de prise de conscience et d'évaluation rationnel de son ressentiBref je n'ai pas (encore) trouvé de solution magique surtout pour une entreprise de taille importante (mais est-ce que ça a du sens de penser à l'échelle de la boite dans ce cas à, c'est encore un autre débat).Il y a quelques mois j'ai réfléchi à une alternative en pariant sur une approche qualitative et fait un pilote mais je n'ai pas eu l'occasion d'aller au delà du pilote pour en évaluer la reproductibilité. J'en ai fait un résumé ici si jamais tu en es curieuse.

Bref, je suis pas certaine de t'avoir beaucoup aidé mais le sujet est passionnant